Madame Royale le Dauphin Louis Joseph

Fille de France, Marie-Thérèse Charlotte de France était la fille de Marie-Antoinette et de Louis XVI. Plus connue sous cette appellation, Madame Royale, elle fut l’unique survivante de la Révolution française. Découvrons ensemble, avec Sylvie Yvert, auteure de Mousseline la Sérieuse, comment Madame Royale a survécu au Temple et la vie d’après.

Mousseline la Sérieuse, au caractère bien trempé et orgueilleux

Un enfant attendu

Marie-Thérèse Charlotte de France est née le 19 décembre 1778 à Versailles et est morte le 19 octobre 1851 à Frohsdorf en Autriche, dans la patrie d’origine de sa mère, Marie-Antoinette.

Le prénom qui lui a été donné à sa naissance est celui de sa grand-mère maternelle, l’impératrice Marie-Thérèse. Selon Marie-Antoinette, la petite fille ressemblait à sa propre mère, une vraie personnalité. (dixit Sylvie Yvert)

L’enfant royal était attendu depuis presque huit ans, soit depuis la date du mariage de Marie-Antoinette et Louis XVI, le 16 mai 1770. Si attendu, qu’il était espéré de voir un enfant de sexe masculin naître. A la grande surprise, ce fut une fille.

Une enfant, qui connaissait sa position

Consciente de son statut, la jeune Marie-Thérèse avait développé un caractère bien trempé couplé d’un fort orgueil. Ce tempérament, elle le gardera jusqu’à la fin de sa vie.

Elle savait ce qu’elle voulait et elle amusait les commères de la Cour de Versailles. Son comportement inquiétait la reine Marie-Antoinette sur l’avenir de la petite fille.

Une petite fille, qui lui eût été égal que sa mère décède

Un jour, où Marie-Antoinette fit une chute à cheval, le confesseur l’abbé de Vermond dit à Mousseline la Sérieuse, que sa mère aurait pu en mourir.

– Cela m’eût été égal, fit Madame Royale
– « Mais Madame ignore certainement ce qu’est la mort ? lui répondit l’abbé.
Non, Monsieur l’abbé, je ne l’ignore pas. On ne voit plus les personnes mortes. Je ne verrai plus la Reine et j’en serais bien aise parce que je ferais mes volontés. Dit Mousseline la Sérieuse.

Madame Royale le Dauphin Louis Joseph
Madame Royale le Dauphin Louis Joseph, 1784 de Vigée Le Brun

Marie-Antoinette a été choquée d’apprendre ces paroles. La petite fille estimait que sa mère s’occupait mal d’elle, contrairement à son père qui se rythmait au pas de sa fille. Un jour qu’elles se promenaient, Marie-Antoinette se tenait loin de sa fille. Elle ne fit pas attention que son enfant ne la suivait pas. Elle était loin d’elle. Marie-Thérèse n’aimait pas ça.

Une autre enfant pour canaliser son caractère : Ernestine Lambriquet

Marie-Philippine Lambriquet, surnommée Ernestine par Marie-Thérèse ne venait pas de ce milieu aristocratique, mais celui du peuple. Elle était la fille d’une femme de chambre. Elle avait le même âge que Marie-Thérèse et deviendra une amie. Ernestine obtiendra le même train de vie que la princesse royale.Ainsi, Mousseline la Sérieuse pouvait ramasser le mouchoir de cette fille, quand elle le faisait tomber pour rester humaine. (dixit S. Yvert).

Cette décision eut un effet positif, car Madame Royale changea de comportement.

Madame Royale, l’unique survivante du Temple

Une famille qui disparaîtra progressivement

Marie-Thérèse vécut au Temple de ses 13 à 17 ans. Elle vit passer quatre années de sa vie en voyant disparaître son père, sa mère, son frère et sa tante.

Tour du Temple
Tour du Temple exposé au Musée Carnavalet

Mise à part pour son père, la jeune fille sut tardivement le décès du reste de sa famille. Pour son frère, Louis XVII, ce fut Madame de Chanterenne qui le lui apprit. Pour sa mère, elle ne savait pas ce qu’elle était devenue et espérait que sa tante lui revienne. C’est au moment de sa libération en 1795, qu’elle apprit la mort de Marie-Antoinette et de sa tante.

Elle avait gardé un grand espoir, car sur les murs du Temple, elle l’écrivait sur sa mère.

Seule dans sa cellule pendant 13 mois, les gardiens avaient interdiction de lui parler.

Seule pendant 13 mois : son caractère lui sauva la vie

Selon Sylvie Yvert, ce caractère bien trempé de Madame Royale a peut-être bien pu lui sauver la vie.

livre mousseline la sérieuse
Livre Mousseline la Sérieuse de Sylvie Yvert à Versailles Crédit photo : Auria.fr

Son éducation fut moderne, celle de Jean-Jacques Rousseau. Ses parents l’ont élevé avec beaucoup d’affection, de tendresse et de fermeté. Elle a été très structurée et très forte.

Au Temple, lorsqu’elle fut avec sa tante, Madame Elisabeth lui donna divers conseils pour rester en bonne santé. Cela lui a sauvé la vie.

Madame Royale suivait ses suggestions :

– Dès 7 heures, il fallait se lever, mouiller sa chambre, la balayer, faire sa toilette, prier et passer aux travaux ménagers.
– Tous les jours, elle devait marcher assez rapidement dans sa cellule pendant 1 heure en comptant ses pas. L’objectif était de rester en forme et de garder une expression du corps.

La religion lui fut, également, d’une grande aide.

Contrairement à son frère, Louis XVII, elle était plus âgée, plus grande avait pu obtenir de précieux conseils pour survivre.

Marie-Thérèse aurait pu devenir folle à ne parler à personne pendant 13 mois. Elle ne savait plus parler. Madame de Chanterenne, qui était venue pour l’aider à se réinsérer ne comprenait pas ce que la princesse lui racontait au tout début. Madame Royale n’arrivait plus à articuler.

Elle n’avait personne à qui parler et surtout, elle avait très peur des gardiens, qui buvaient toute la journée. Qui sait ce qu’ils auraient pu faire si ils l’entendaient parler ou si elle avait essayé de leur parler ?

Pourquoi survit-elle au Temple ?

Pendant 13 mois, Marie-Thérèse fut délaissée. Aucun gardien n’avait le droit de lui parler. Elle ne voyait personne. Ils l’ont abandonné à son sort, tout comme celui de Louis XVII : à une mort lente.

Après le 9 thermidor, la Convention devient plus malléable. Barras ne compte pas guillotiner Madame Royale et souhaite la garde en petite monnaie d’échange. L’Espagne réclamera sa cousine. L’Autriche se sentira obligé de la prendre. La jeune femme n’avait pas une bonne réputation car elle avait des idées avancées. Elle inquiéta fortement l’empereur François II, qui changera d’avis lorsqu’elle sera exilée en Autriche.

Après le Temple, la Duchesse d’Angoulême

Un exil en Autriche, mais son coeur en France

Elle quitte la France à Bâle. Elle se retourne et dit à l’ambassadeur de France : je suis de France, ne l’oubliez pas.

Portrait de Marie Thérèse de France
Portrait de Marie Thérèse de France, après 1795 de Heinrich Friedrich Füger

Sylvie Yvert nous partage ces instants :

Madame Royale a vu uniquement des choses terribles depuis ses 10 ans. Par la suite, elle n’aura qu’une idée en tête, que la France redevienne comme avant. Elle voulait également être enterrée à côté de ses parents.

Le choix du Duc d’Angoulême

Elle suivit le choix de ses parents lorsqu’elle fut petite : le Duc d’Angoulême, comme un potentiel futur mari. Marie-Antoinette ne voulait pas que sa fille subisse le même sort que le sien : être exilée de sa patrie et se retrouver dans un pays inconnu avec une langue inconnue.

Louis-Antoine d'Artois, duc d'Angoulême
Portrait de Louis-Antoine d’Artois, duc d’Angoulême

Sylvie Yvert nous partage ces détails :

En se mariant à ce duc, cela signifiait se marier à un français, se dit-elle. Ils ne pouvaient, ainsi, avoir qu’un fils légitime pour les français, bien qu’elle avait compris qu’ils avaient changé d’époque quand Charles X se fit couronner.

Louis de France, duc d’Angoulême sera le seul homme de sa vie. Elle n’éprouvait pas d’attirance pour lui lors de leur rencontre, mais lui n’avait cessé de lui déclarer son amour par une correspondance épistolaire. Ils se trouveront, progressivement, des points en commun. Leur histoire durera 45 ans.

Ils n’eurent pas d’enfants. Peut-être le duc et/ou la duchesse étaient stériles ? Peut-être était-ce lié à une part de la psychologie ?

Le règne le plus court de France

En 1830, elle deviendra reine de France pendant 20 minutes.

Sylvie Yvert nous en dévoile plus sur la personnalité de Marie-Thérèse :

Elle a décidé de rester très discrète, si elle avait pu rester seule dans un coin, elle l’aurait fait. Elle était très timide, comme son père, et devenir le centre de tous les regards ne lui convenait pas. Surement, le fait d’avoir été seule dans sa cellule a pu jouer dans son tempérament.

Portrait de Marie Thérèse de France 1827
Portrait de Marie Thérèse de France 1827 d’Alexandre-François Caminade

Ainsi, elle abhorrait être regardée par tous, comme si elle fut une relique ou un souvenir de parents royaux guillotinés. Les yeux plaintifs de la Cour, les évanouissements de certains, ceux qui disaient « ce qui nous reste de Louis XVI »… tout cela l’exacerbait.

Sources :
Livre Mousseline la Sérieuse de Sylvie Yvert
Interview de Sylvie Yvert
Gallica BNF
Europe 1, émission de Franck Ferrand Mme Royale, la survivante
France Info, émission sur Madame Royale, fille de Louis XVI et Marie-Antoinette
Secrets d’Histoire, émission sur Madame Royale